Ouest-France 27 mai 1977


L'aviso "Quartier-Maître-Anquetil" porte le nom d'un résistant du bessin


Sixième de la série des avisos " A 69 ", le"Quartier-Maître-Anquetil"a été remis à l'autorité maritime - le 30 avril dernier, au cours d'une cérémonie de prise d'armement qui s'est déroulée à Lorient, en présence de nom- breux résistants du réseau" Confrérie Notre-Dame "dont le chef était le colonel Rémy.
L'aviso est un bâtiment rapide dont la mission principale est la lutte anti-sous-marine, mais qui peut également être utilisé pour la surveillance maritime, l'instruction à la mer, la surveillance des pêches...

Pour les habitants du bessin qui ont vécu l'occupation, le nom de Bernarq Anquetil ne peut passer inaperçu.


Qui était Bernard Anquetil ?


Né à Formigny en 1917, Bernard Anquetil vivait avant la guerre avec son pére, chez sa soeur Mme Drean, qui habitait Colleville- sur-mer. Célibataire, il était clerc de notaire à l' étude de Me Pommier à Trévières, où une rue porte son nom, ainsi qu'à St- Laurent-sur-Mer.

Dés le début de la guerrre, il naviguait en qualité de radio à bord du sous-marin " L'Ouessant ", sabordé à Brest en 1940. Le mécani- cien n'était autre que M Le Rochais, un Bayeusain, actuel secrétaire de la société des sciences, Art et Belles Lettres. Le commandant en second était le lieutenant de vaisseau Philippon ( pseudonyme Hilarion ), devenu vice-amiral d'escadre, qui est le président de l'Amicale des anciens du réseau " Confrérie-Notre-Dame ".

C'est lui qui répondit au colonel Remy, venu lui demander un opérateur radio : " je ne peux vous recommander que de quelqu'un dont je suis absolument sûr. Je ne vois qu'un de mes anciens quartier-maître de "Louessant ", Berbard Anquetil, qui puisse faire votre affaire. "




Fusillé au Mont-Valérien


Bernard Anquetil accepta avec enthousiasme : il entra en mars 1941 au réseau " Confrérie Notre-Dame " et devint le premier en date des opérateurs radio du Colonel Rémy.

Un poste émetteur fut installé à Saumur, et par l'intermédiaire du radio Anquetil (pseudonyme Lhermite), les contrats avec Londres ont été pris. Hélas, au bout de quatre mois, le 30 juillet 1941, Bernard Anquetil fut arrêté à Saumur. Il tenta de s'enfuir, fut tiré à 20 métres et bléssé. Soigné à Angers et guéri, Bernard Anquetil fut transféré à la prison de Fresnes, Le Colonel Rémy essaya de le faire évader, mais l'opération échoua ; il refusa de s'assurer la vie sauve - que lui promettaient les Allemands - en révélant l'identité et le refuge de son chef, le Colonel Rémy, et des membres du réseau (qui compta jusqu'à 1200 personnes). Il comparut alors devant une Cour martiale allemande et s'entendit condamné à mort pour usage d'un poste émetteur de T.S.F, ; il a été fusillé le 24 octobre 1941, au Mont Valérien ; il avait 24 ans.

Les télégrammes de B. Anquetil


Son héroïque conduite lui a valu la croix de la Libération et une citation à l'ordre de l'armée de mer ; il fut nommé compagnon de la libération à titre posthume ; inhumé au cimetiére de Colleville-sur-mer en 1944, il repose sous la même dalle que son père, tué en août 1944. Dans son livre " Le blocus de Scharnhorst et du Gneisenau ", l'amiral Philippon écrit " De l'avis des services alliés, les télégrammes qui purent être envoyés à Londres par Bernard Anquetil ont vraiment contribué à l'impossibilité, pour les cuirassés "Scharnhorst" et "Gneisenau", ainsi que pour le croiseur 'Prinz-Eugen", de quitter Brest pour éffectuer dans l'Atlantique les croisières prévues par le commandant allemand, croisières qui auraient eu pour résultat de ravager les convois alliés ".

Les survivants du réseau " Confrérie Notre-Dame " et les anciens marins de " L'Ouessant " ont assisté à cette émouvante prise d'armement. Ce fut l'occasion, pour le vice-amiral d'escadre Philippon, de rappeler la conduite héroïque de Bernard Anquetil, un enfant du Bessin qui a fait preuve, pendant la guerre, d'un dévouement absolu à la France.
Monique QUATRAVAUX
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